Château Le Grand Dragon


Le Grand Dragon au temps de sa splendeur (1980?)


Vue aérienne (2006) des ruines du château, du pigeonnier et des écuries restaurés.

Quelques repères historiques

Au lieu-dit "Le Dragon", existaient, en 1824, un bâtiment rural et une maison de classe 5 (avant-dernière catégorie du classement des maisons de cette époque) appartenant à la famille de Vigneras. Ce domaine fut partagé, vers 1850, par héritage. En 1860, Mme Jardel-Laroque, née Gérard, acheta des terrains au Dragon et fit construire une maison de classe 2, terminée en 1862.  En 1874, J.-A. Charriol acheta cette propriété , fit démolir en partie la maison  et fit construire un nouvel ensemble, le château, terminé en 1876 et imposé en 1877. Il fit également construire, avec le château, les écuries, la maison du gardien et un superbe pigeonnier en forme de pagode, encore visibles actuellement.

En 1882, le château fut acheté par la veuve d' Herman Cruse, née Sophie Lawton, et il resta longtemps dans cette famille.

Pendant la seconde guerre mondiale, il fut occupé par l'armée allemande, comme d'autres châteaux de Bouliac, et quelques artisans de la commune furent contraints d'y exécuter quelques travaux d'entretien.

A la fin du XXe, le château devint maison de retraite dont la cessation d'activité fut suivie par l'abandon du domaine , abandon marqué par le vol et le vandalisme.

Que restera-t-il de ce beau château dans quelques années ?

Mais d'où vient ce dragon ?

Cette question, je l'ai posée à Marie-José Brochard, spécialiste du département d'étymologie  au dictionnaire Le Robert .
Voici sa réponse

Le château du Dragon, à Bouliac, a pris le nom du lieu sur lequel il a été construit, la parcelle du Dragon.
Il est difficile d’avoir une idée précise de l’origine de ce nom de lieu (toponyme) sans avoir de données anciennes. La première apparition de ce nom date de 1824. Il est  clair qu’au cours des siècles précédents, ce terrain a pu porter un autre nom, totalement différent, celui de son propriétaire ou alors d’une particularité géologique du terrain.  Dragon peut être également la déformation d’un autre mot. En onomastique, c’est-à-dire dans l’étude des noms propres (noms de lieux, de personnes, de fleuves, de montagnes), il faut posséder des sources anciennes pour retracer sans équivoque possible l’histoire d’un nom.

 Une origine française ?
Quoi qu’il en soit, dragon est un mot français — et non dialectal — qui a deux sens principaux tels que les enregistre le Petit Robert de la langue française (édition 2010)  :
• Le premier est celui d’ « animal fabuleux qu'on représente généralement avec des ailes, des griffes et une queue de serpent », nous ajouterons « et qui crache du feu ». Viennent se greffer sur ce sens des emplois métaphoriques : « 
gardien, surveillant vigilant et intraitable » et « femme acariâtre, violente, aux manières brutales » ;
• Le deuxième est celui de « soldat de cavalerie ».
Nous disions plus haut que le mot dragon est français. Mais il se peut aussi qu’il soit le résultat d’une francisation d’un mot patois, en l’occurrence
dragoun.
Une origine dialectale ?

Il est donc intéressant de voir ce que disent les dictionnaires spécialisés,  si dragoun avait d’autres sens que le français.
En consultant Lou Tresor dóu Felibrige ou Dictionnaire provençal-français embrassant les divers dialectes de la langue d’oc moderne de Frédéric Mistral, publié de 1878 à 1886, nous trouvons un article dragoun, dragou (l[anguedocien]) qui a les mêmes sens que ceux que nous avons cités pour le français : « animal fabuleux », « frelon, bourdon » dans le Rouergue, « faux à couper l’herbe », en Béarn, « soldat de cavalerie », diverses plantes (globulaire commune, aphyllanthe) ainsi qu’une remarque intéressante : nom de fam[ille] méridional.
C’est une autre piste à explorer.

Un nom de famille ?

En effet,  les noms de lieux (toponymes) sont parfois issus de noms de personne (anthroponymes).  On rencontre fréquemment des hameaux qui portent comme nom chez X, par exemple. Il existe  donc la possibilité que ce nom de lieu ait pour origine un nom de famille. La carte ci-dessous nous renseigne à ce sujet. Nous voyons que ce nom est porté par 47 personnes en Gironde


 et que c’est le seul département d’Aquitaine où il est représenté, à date récente cependant (1925, Dragon de Gomiécourt ). Son origine (Normandie) remonte à dragon, au sens d’ « animal fabuleux », comme l’atteste le Dictionnaire des noms de famille et des prénoms de France d’Albert Dauzat, publié en 1951 chez Larousse. Il paraît impossible que ce nom de famille vienne du sens de « soldat de cavalerie », ce sens n’étant attesté que depuis 1594, le nom de famille étant beaucoup plus ancien : 1350, sans localisation. Il faut cependant noter que les premières mentions de ce nom de lieu apparaissent sous la forme château du Dragon, terrain du Dragon et non de Dragon, ce qui excluerait une origine anthroponymique. Quoique cette origine ait pu se perdre et que le nom ait pu être assimilé au plus courant dragon « animal fabuleux ».


http://www.nom-famille.com/nom-dragon.html

Conclusion
Le lieu-dit Dragon de Bouliac pourrait ainsi devoir son appellation
. au sens du français « animal fabuleux ». Y aurait-il eu sur ce terrain un arbre qui aurait évoqué la forme d’un dragon ? Le ou la propriétaire aurait-il gardé jalousement son terrain ? Aurait-elle été acariâtre et vindicative ?
. au sens du français « soldat de cavalerie ». Le terrain aurait-il appartenu à ce soldat ?
. au nom de famille Dragon ?

Pour confirmer ces différentes hypothèses, il faudrait disposer de sources plus anciennes, des relevés cadastraux, des registres de paroisse, car  cette dernière hypothèse est peut-être la clé de l’énigme. En attendant, laissons-nous porter par notre imagination : un dragon ailé avait son antre sur cette parcelle…

 

 

DOMAINE DU GRAND DRAGON – SUPRESSION DE SERVITUDE
Délibération du Conseil Municipal du 09-2007-9

Mr FAVROUL, Maire, explique que la propriété du Grand Dragon est aujourd’hui propriété de la SA FRADIN qui projette de restaurer le château et de lotir une partie située à proximité de la zone urbaine de Bouliac. Il rappelle que dans ce même secteur, route Bleue, une maison de retraite sera bientôt construite.

 

Quelques photos prises en 1993

Façade sud-ouest du Grand Dragon en 1993.

 Détails du niveau supérieur de la façade sud-ouest du grand Dragon (1993)

 

Détail de la façade sud-ouest en 1993

 La façade nord-est du Grand Dragon en 1993

 

La façade sud-est en 1993

 Les écuries et le pigeonnier en 1993

 

Aile ouest des écuries en 1993

Baie des écuries en 1993

 

Début du XXème

 Horloge au-dessus de la fenêtre centrale  du niveau supérieur

 

Le Grand Dragon en septembre 2009


Façade sud-ouest du Grand Dragon en septembre 2009
                                                                                                                                                                                                                            Porte d'entrée et balcon de la façade sud-ouest en septembre 2009

 

Façade nord-est en 2009

 Le pigeonnier en 2009, restauré vers 2000. A gauche, on devine les ruines du château.

 

Pigeonnier et baie des écuries en 2009

Une partie de l'intérieur des écuries en 2009, à droite de la baie d'entrée

Petit Dragon et Grand Dragon en 2010 : Petit Dragon est la propriété, mitoyenne du Grand Dragon, de Mme Breuil.
Au pied de la pile de droite du portail du Grand Dragon, la borne, qui protégeait la pile des roues des voitures à chevaux, est encore là.